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Les brèves d'eau

Ecrit par: lolaa
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Nombre de mots: 515

Mille filets de glace, comme autant de doigts, enserrèrent ses jambes, voulant l’arrêter avant même qu’il ne commençt sa descente.
Mais il s’y attendait, et, déterminé, se jeta dans le courant et commença à nager.
Il fut immédiatement emporté, fétu de paille, infime particule, ridicule homoncule qui osait défier le maître.
Ses doigts glissaient sur les cadavres des rochers qui tapissaient le lit du torrent et qui ne pouvaient plus lui offrir une quelconque prise.
Le Verdon sut à ce moment qu’il avait gagné, et s’amusa de cet avorton sous les falaises qui contemplaient, impuissantes, son martyre.
Mais il avait résisté, et, quand son adversaire trop confiant crut avoir gagné et qu’il ralentit sa course, il put reprendre le contrôle.
Il ne sentait plus le froid de l’eau, son sang téméraire battait dans ses tempes, et réchauffait ses membres tendus dans l’effort.
Mais alors le Verdon comprit qu’il était en danger, et il appela le ciel d’août à la rescousse.
Soudain, des nuages noirs de colère montèrent dans les gorges, changeant le décor de cette après-midi d’été pour en faire le thétre morbide du dernier combat.
Le tonnerre rivalisait de puissance avec le grondement de l’eau, et les grands éclats de rire des alliés zébrèrent le ciel.
Et la pluie se mit à tomber sur le plateau, là-haut, et sur la terre desséchée, elle se rassembla en ruisseaux, en torrents, en rivières, et c’est de tous côtés qu’elle se mit à dégringoler, avalanche se ruant pour apporter son renfort.
Et la rivière enfla, voyance nourrie par des milliers de veines, et la vague se créa.
Elle le prit alors qu’il croyait avoir réussi.
Elle le souleva, l’entraîna au fond, le meurtrit, emplit sa bouche et ses yeux.
Et puis, sadique, le déposa, gentiment, doucement, entre deux rochers immergés, et le laissa là, la tête sous l’eau, les yeux vers le ciel qui scintillait au-dessus du thétre de l’affrontement.
Il lutta d’abord, se meurtrit les chairs, épuisa ses dernières forces, mais c’était vain.
Il était seul avec la rivière qui l’entourait de ses caresses et qui attendait de pouvoir baiser sa bouche.
Alors il renonça, et le ciel au-dessus, le coin de ciel bleu qu’il distinguait au-dessus des fières falaises, horoscope 2011  fut le dernier spectacle qu’il voulut admirer.
Ce coin de ciel bleu, qui semblait comme pleurer son sort, lui apporta la sérénité qu’il avait cherchée dans la victoire.
Et c’est apaisé, qu’il cessa de lutter, son regard sur l’inatteignable.
Et alors qu’il s’abandonnait, le Verdon comprit avoir perdu, David vainquait Goliath par son courage et son audace.
Alors, dégoûté, comme le corps commençait à se détendre, le torrent le saisit, l’entraîna au plus profond des abysses, et le recracha au loin, méprisant, cachant par son mépris sa défaite ultime.
Il lui fallut quelques minutes pour reprendre son souffle.
Il contempla la rivière qui surgissait du canyon telle une charge de cavalerie venue du plus profond de la terre mère elle-même.
Le soleil brillait, il tremblait, mais il ne savait pas si c’était de froid, de peur, ou de reconnaissance envers celui qui, dans la bataille, lui avait montré sa force et sa mansuétude.
Et le Verdon coulait devant lui, passant sous le pont des falaises orgueilleuses, continuant son cours, inéluctable.

A propos de l'auteur

Le ciel l’avait trahie en déchaînant ses orages.
Tant de fois elle avait subi ses assauts, que le bruit du tonnerre, pour toujours, résonnait dans ses entrailles, litanie chantant la victoire des flots.
Il était descendu par un vallon étroit, taillé dans la falaise par un coup de sabre, et où de rares chênes tentaient de cacher la blessure.
Mais leurs branches chétives étaient dérisoires sur le blanc immaculé des débris de rochers emportés par les écoulements, et abandonnés en route.
Il lui semblait pénétrer le torrent lui-même ; le bruit des pierres roulées dans son lit, brisées et dont toute aspérité avait été anéantie, l’entourait de mille gémissements.
Ce vacarme le faisait vibrer au plus profond de sa chair, avertissement terrible, la voix de celui qui n’avait jamais été vaincu.


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